samedi 6 février 2010

Loppsi2 : confiscation automatisée du véhicule

En décembre dernier, Dominique Bussereau, notre préposé aux Transports, paradait à Pékin avec la délégation française, loin du boxon hexagonal : RER A enlisé dans la grève, aéroports perturbés, tunnel de l’Eurostar bloqué…

Sans doute étourdi par le gigantisme de la dictature chinoise, le sous-ministre dilettante nous est revenu de son voyage comme affligé de turista répressive. Il annonce vouloir passer la "surmultipliée" face à un bilan 2009 mitigé en terme d’accidentologie. Et de nous en glisser une belle sous les roues, sortie de la répugnante Loppsi 2, actuellement soumise au Parlement et pondue par Sarkozy Nicolas. Ce "dispositif d’exception" promet entre autres joyeusetés (vidéosurveillance, flicage du web...) d’inciter nos forces de l’ordre à confisquer systématiquement les véhicules des « chauffards » avant de les revendre… au bénéfice de l’Etat.

Pour mémoire, la « confiscation » date de l’ancien régime. Elle touchait les biens des condamnés et de leurs héritiers avant d’être abolie par la Révolution française. Reprise par les Nazis pendant la dernière Guerre mondiale pour racketter les Juifs, cette saisie devenue sanction perdura pour récupérer les armes, les stupéfiants, ou les contrefaçons auprès des gangsters. Plus générale, elle frappe les barons de la drogue, les auteurs de crimes contre l’humanité, ou les terroristes.

Nicolas Sarkozy - en grand démocrate - propose donc que la confiscation policière ne soit plus réservée aux grands assassins et autres génocidaires, mais qu’elle revienne toucher Monsieur Tout-le-Monde. A condition que celui-ci commette - par exemple - un "délit de grande vitesse" (à partir de 40km/h au-dessus de la limitation) au volant de sa voiture ou au guidon de son deux-roues.
Les habituels normopathes et autres pleureuses de sous-préfecture nous expliqueront que c’est bien fait pour les méchants chauffards et blablabla. Mais reste la question de l’empilement sinoque des punitions. Pourquoi en rajouter avec Loppsi 2 alors que les risques pénaux encourus sur la route sont déjà délirants ?

Revue de détail avec le journaliste Jean-Pierre Steiner : « Homicide involontaire : 75 000 €, 5 ans d’emprisonnement, 5 ans de retrait de permis. Blessures involontaires : 2 à 3 ans de taule, 30 à 45 000 €, 5 ans de retrait. Jusque-là pourquoi pas ? Mais c’est ensuite que ça dérape. Un détecteur de radar non autorisé vaut à son possesseur 2 ans de prison, 30 000 € d’amende et 3 ans de retrait. Mettre des mineures des pays de l’Est à tapiner coûte moins cher ! Optimiser le moteur d’un cyclo, même punition : 2 ans à bronzer rayé, 30 000 €. Il vaut mieux carrément voler des scooters ça craint moins. Délit de grande vitesse si récidive : 3 mois de frigo, 1500 €, et 3 ans de retrait ! C’est presque aussi hard que de se faire piquer à dealer le l’héroïne ! »

Cet effarant durcissement de régime était venu ponctuer les glapissements sécuritaires de Jean-Claude Gayssot et Marie-Georges Buffet (PC) en charge des Transports sous le gouvernement Jospin (1997-2001). Voilà qui ouvrait grand la porte à la lourde machine mise en place fin 2003 par Nicolas Sarkozy (alors ministre de l’Intérieur) : le programme « 1000 radars automatiques ». Sept ans plus tard, tandis que 2500 photomatons crépitent au bord des routes, Sarkozy Nicolas nous en remet une tartine, beurrée d’une couche de Loppsi 2.
Rappelons pour la bonne bouche que ces mesures toujours plus coercitives sont disproportionnées : la courbe de mortalité routière baisse depuis… 30 ans.
Résumons. Prison et/ou amendes, annulation de permis, et maintenant saisie du véhicule. Quel est le but inavoué de cette dernière filouterie ? Réponse : outre, fournir des véhicules banalisés aux forces de police, booster un chiffre d’affaire qui fait saliver en haut lieu, celui de la ligne "confiscation de véhicules" (déjà 10 870 497 euros en 2008 !). L'Agence de Gestion des Biens Confisqués vient d’être (discrètement) créée dans ce but.
Nos dirigeants devraient aller au bout de l’idée, jouer franc jeu, et faire passer la "Sécurité routière" sous la coupe du Ministère du Budget.

Cet article a été publié sur Agora Vox


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