samedi 27 mars 2010

Route : la fabrique du chiffre

Selon la publicité officielle les chiffres 2009 de la mortalité routière seraient en légère baisse. Cette statistique obtenue à l’arrache par le ministère de l’Intérieur est un énième bobard destiné à masquer un système de plus en plus contestable…


En début d’année Brice Hortefeux a dégainé des chiffres formidables. En terme de sécurité, peu importe la réalité, tout va mieux. Côté bitume il assure que tout ne va pas plus mal, mais cette fois le (dernier) cow-boy de l’Elysée a senti passer le vent de la balle adverse.

Flash-back : fin septembre branle-bas de combat à l’Intérieur : la mortalité routière 2009 promet d’être en hausse officielle pour la première fois depuis huit ans… alors que le citoyen motorisé subit une vague de répression sans précédent. Voilà qui disqualifie les milliers de radars sarkozystes et la juteuse traque aux motorisés. Vite, il faut des chiffres baissiers avant la fin de l’année. Fastoche. Entre autres astuces et manipulations inavouables il suffira d’inciter les forces de l’ordre à mettre ponctuellement un coup de collier sur une tradition bien française : la conduite alcoolisée de fin de semaine – ce sera fait sur le dernier trimestre 2009 grâce à une circulaire d’Hortefeux (datée du 9 octobre).

Grâce à un mois de décembre « salvateur », l'ONISR, l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière annonce début 2010 la nouvelle qui sauve la baraque : pour 2009, baisse de 0.3% des tués de la route. Ouf.

Problème. Cette représentation de la réalité n'est pas la réalité. Sur le terrain, nous avons assisté l’an passé à une hausse des accidents, au moins par kilomètre parcouru. Puisque dans le même temps - selon les chiffres des pétroliers qui viennent de tomber - le trafic automobile continue de décroître. Une tendance nette, amorcée en 2007 (1).

Des chiffres d'accidents d’autant plus préoccupants que la mortalité routière baisse « naturellement » depuis 30 ans grâce – entre autres - aux véhicules plus sûrs, à un parc de véhicules moins transgressifs, à une route mieux partagée…

Résumons : les radars n’ont jamais été si nombreux au bord des routes, la traque aux PV n’a jamais été si féroce, et les résultats sanitaires restent désolants. Rappelons même que la décrue en terme de bons résultats s’est amorcée en 2005, année de l’implantation d’un nombre significatif de photomatons routiers.

Voilà qui confirme si besoin la thèse développée dans mon livre : les radars n’ont pour fonction que celle de ponctionner le quidam, en attendant de tracer et contrôler ses déplacements motorisés. Mais en terme d’accidentologie, les cabinettes sarkozystes sont inefficaces, et même perverses : cette diarrhée répressive agit comme un leurre sur l’action publique, accaparant ses ressources humaines et financières, étouffant toute velléité de (vraie) politique de sécurité routière. Causant finalement, et indirectement, des morts.

(1) Exemple : en 12 ans, la consommation d’essence en France est passée de 15 millions à 10 millions de tonnes.


mercredi 17 mars 2010

Grogne des motards, presse et enfumage...

A l’appel de la FFMC agacée par l’ambiance répressive et les menteries du gouvernement, des dizaines de milliers de motards et scootards ont bloqué les rues et fait rugir les moteurs le 13 mars dernier en signe de protestation. Mais l’enfumage n’est pas là où on l’attendait.

Charles Péot, motard et directeur du Codever, a écrit sur sa page Facebook : « 40 000 manifestants dans 58 grandes villes, 8000 motos dans les rues de Paris et voilà le traitement de cette actu par TF1 : 10 secondes, et France 2 : rien. Les deux chaînes TV nationales nous ont démontré une fois de plus qu'elles sont à la botte du pouvoir. Relayer le message des motards en colère ...serait faire prendre conscience aux automobilistes qu'ils sont rackettés eux aussi, donc surtout, ne pas en parler. Ca pourrait déplaire au gouvernement ! Les médias 4e pouvoir ? Mon cul ! »
C’est dit virilement, mais comment ne pas être d’accord ? Lors de cette journée, nous étions au-delà de la balade manifestive. La mobilisation fut monstre, partout en France. La contestation est raisonnée, étayée. Les manifestants sont excédés. Mais hormis les presse régionale et moto, les retours de la part des « grands » médias sont en effet proche de zéro. Rien la veille, quelques clous le lendemain. A Paris, des milliers de badauds et automobilistes surpris par les blocages, découvrirent une nouvelle fois à quel point les journalistes parisiens sont loin de la rue. On ne peut s’empêcher de penser à une consigne d'un gouvernement désireux d’étouffer « l’affaire », surtout avant les élections régionales. « Consigne » est un grand mot dans la mesure où beaucoup de nos zélés petits miliciens de l’info sont devenus des champions de la censure sans censeur.

Lisez plutôt Bakchich.info qui a relayé la manifestation parisienne. D’ailleurs pub ! Achetez Bakchich Hebdo, la version papier qui vient de reparaître en kiosque (voir photo). Un euro seulement, et une nouvelle mouture agréable à lire, et toujours iconoclaste.

Cliquez ici : Les motards se rebiffent, sur Bakchich.info, un article signé Jean-Luc Nobleaux, d’ailleurs candidat au Pulitzer 2010 avec ce papier de haute volée. Après tout c'est du journalisme gonzo, j'y étais au guidon de mon vieux Vespa !